Il s’agit — le titre du recueil « Sous les vergnes » le dit assez — de contes campagnards et paysans qui ne sont pas sans rappeler souvent, par l’acuité du trait, la précision du détail, et le sens du portrait, les meilleures pages de Jules Renard. Il est vrai que Paul Minot est, comme le père de Poil de Carotte, Nivernais de pure race. Ces histoires de quelques hommes et femmes de la terre vont de l’humour le plus discret ou du grand rire de Rabelais à l’émotion la plus profonde et à l’atmosphère la plus dramatique. Elles sont à l’image de la vie, avec ses grandeurs et ses petitesses, ses joyeusetés et ses misères. Quel que soit le personnage en cause, que ce soit Petit Louis, le plus grand buveur de Pouilly, la Clotilde dont chaque enfant a un père différent mais qui n’est jamais le mari, le braconnier Bouzy, dit le Renardier, qui sut venger — de quelle atroce manière — son fils fusillé par les Allemands, quel que soit le personnage, Paul Minot le peint en touches légères mais franches, il le fait vivre et nous le fait voir. Et, bien que, selon le mot de Thibaudet, il reste, en bon auteur de nouvelles, « sur le rivage avec son chevalet et sa toile », Paul Minot sait communiquer au lecteur l’immense indulgence, la chaleur humaine et la pitié fraternelle qu’il éprouve pour ses héros.