Ce récit, basé sur des souvenirs authentiques, évoque pour la première fois le fonctionnement des services spéciaux vus du dedans, par un homme qui y a vécu. L’on est très loin des histoires imaginaires qu’une littérature récente a mises en avant, mais le véritable problème y est posé. Un jeune Français, qui a 25 ans vers 1937-38, est affecté par hasard ou par choix de ses chefs, au Service des renseignements de l’État-Major, car il a été maintenu sous les armes par les circonstances. Il sera envoyé en Italie, pays jadis ami, mais qui vient de s’allier aux Allemands et dont il faut bien connaître les intentions comme les préparatifs guerriers. Le héros s’installera ainsi à Rome, au siège d’une mystérieuse Société commerciale internationale, qui cache en réalité un important bureau centralisateur de renseignements pour les Alliés. Il vivra là une existence aventureuse, travaillant avec un jeune officier anglais, Roberts, plein d’imagination et de fantaisie. Les enlèvements de personnalités seront suivis de vols de valises diplomatiques, d’attentats contre les navires marchands qui aident Franco ; parfois, nos hommes monteront de grosses farces aux Italiens ou même aux Français, mais ils poursuivront toujours la tâche difficile de la recherche et de l’acheminement rapide du renseignement militaire ou politique. Ayant ainsi joué à cache-cache avec les carabiniers du Major Navale (le chef du contro-spionnaggio), le Français sera finalement arrêté et traduit devant le Tribunal spécial qui juge les traîtres, les espions et les antifascistes d’une main très lourde. Condamné à 25 ans de prison, notre agent brûlé connaîtra l’existence morose des pénitenciers italiens pendant des mois de guerre où le moral fasciste dégringole, alors que l’emprise allemande s’affermit. Mais les Services français, bien que le pays soit vaincu et occupé, n’abandonnent pas leurs hommes. Malgré les conventions d’armistice, malgré Laval, l’on arrêtera des Italiens en France dans le seul but de récupérer les nôtres. Ainsi notre homme sera-t-il échangé, à Modane, en 1941. Il ne reconnaîtra plus son pays sous l’autorité de Vichy, mais il ira grossir les rangs de ceux qui ne se rendent pas, pour qui la guerre continue : les services spéciaux demeurés en place. Et ce seront de nouvelles aventures jusqu’à la Libération. Là, les amis qui demeureront dans le jeu dangereux, disparaîtront et notre héros se retrouvera civil, un homme parmi tant d’autres, partagé entre deux sentiments contraires : la pensée que tout cela était bien inutile ou cruel, la nostalgie des aventures passées du temps qu’il était agent secret et qu’il pouvait commettre mille sottises impunément, avec l’excuse du service du pays.