Printemps 1108. Roland, chevalier de la Syrie franque, rentre chez lui, « porteur d’histoires, de nouvelles funèbres mais prodigieuses, en pleine gloire ». Il est vivant. Douze ans plus tôt, il quittait ce pays, choisi par son seigneur et père Guillaume pour l’accompagner en Terre Sainte. Choisi, lui le bâtard né d’une fille de forgeron, alors que son demi-frère Thibaut, né du ventre légitime de l’épouse, restait au château. La terre qu’il retrouve porte les marques de la sauvagerie. Et le château de Thibaut est maintenant un repaire de chevaliers brigands. Le poids de ce qu’a vu le ciel pèse sur ce pays où les anciennes croyances celtes s’opposent encore à la parole chrétienne, où les arbres sacrés continuent de vivre dans les charpentes. En ce temps-là d’hier, si loin, si peu éloigné, ce temps qui pue la terre et le sang, et le feu des massacres, ce temps vibrant du rire d’une fille inventant l’amour et tremblant aux hurlements des malédictions, celui des miracles alchimistes, en ce temps-là Alain Riondet est allé. Il en est revenu « porteur d’histoires prodigieuses » qu’il nous donne à respirer à notre tour. C’est là-bas qu’il est retourné, sans doute, une fois déposée son offrande.