Même dans les moments les plus cruels de leur existence, les gamins du pavé restent des enfants. Moqueurs dans leurs guenilles, le ventre vide mais l’esprit plein d’humour, ils savent se saisir de toutes les minutes de joie. Dans son rôle de clown, Mugurel singe un chauffeur de taxi obèse qui se goinfre de sandwichs en grattant sa bedaine. Il est drôle, nous rions aux éclats. Le temps d’un après-midi, un pistolet à eau fait retrouver à Nicu et Marius les jeux de leur âge. Comme tous les petits du monde, ils fondent sous la caresse. Ces instants de gaieté nous rappellent combien l’envie de vivre peut être vivace. Chez ces déshérités, abandonnés de leurs familles, réduits à la mendicité, aux petits boulots et à la rapine, victimes de la drogue, traqués par la police, l’élan vital ressurgit toujours. Héritiers de la folie de Ceaucescu, témoins de la misère matérielle et morale de la Roumanie, les enfants de la rue cherchent l’avenir. Le livre raconte le parcours de ces gosses, leurs errances et leurs espoirs. Outre les différents reportages qu’ils ont effectués depuis février 1991, les auteurs ne se sont pas contentés du constat et de l’analyse, très vite ils ont ressenti la nécessité de passer à l’action. Avec l’association Equilibre, ils ont travaillé à l’ouverture d’une maison d’accueil pour les enfants fugueurs, vagabonds, abandonnés de Bucarest. Cette maison, Gavroche, existe depuis avril 1992.