René Théophile Laënnec n’est pas seulement l’inventeur de l’auscultation. Par ses découvertes anatomo-chimiques mémorables, il a, plus qu’aucun autre, mis un point final à la vieille tradition hippocratique ankylosée, et posé les problèmes, défini les méthodes de la médecine scientifique moderne. Grave et charmant génie, son caractère se trempe durant la Révolution, la Terreur, la guerre civile. Abandonné quasiment par un père frivole et égoïste, il grandit au foyer d’un oncle médecin, admirable de clairvoyance et de sollicitude. Il avait, à dix-huit ans l’esprit le plus orné, le jugement sûr, une bonne humeur exquise et distinguée. Arrivé à Paris en 1802, il se choisit les meilleurs maîtres et ne tarde pas à se faire connaître par d’importantes découvertes. J’ai voulu montrer succinctement ce qu’était la médecine, en doctrine et en pratique, sous le Consulat et l’Empire et comment le jeune Laennec se dégagea des systèmes à la mode et posa les jalons d’une médecine nouvelle. Après avoir brillé d’un éclat singulier, il fut bientôt oublié par les maîtres de l’heure, et dépourvu de toute activité hospitalière. Il avait résolu de se retirer en Bretagne, lorsque le hasard d’une rencontre le fit nommer médecin de l’hôpital Necker. Dès lors il devint un maître et construisit son œuvre immortelle. Mon dessein a été de montrer comment naît, malgré les circonstances adverses, une vocation de savant, et comment un très jeune homme, s’il a le cerveau bien fait et le cœur intrépide, peut dissiper des chimères tenues pour orthodoxes depuis des siècles.