Un roman choral qui restitue avec justesse l'atmosphère dramatique de la guerre d'Algérie en conjuguant la force du polar à l'érudition historique.
Un procès, à Saint-Étienne, dans les années 1980. À l'énoncé du verdict pour meurtre, l'accusé, Kamel Hadjedj, hurle son innocence puis se laisse emporter par les forces de l'ordre pour vingt ans de réclusion. Derrière ce drame, se dessine le destin de plusieurs personnages, tous liés entre eux par la guerre d'Algérie.

Ce conflit qui a déchiré la France fait bien souvent figure d'angle mort dans la mémoire collective nationale. Les plaies laissées par ce que l'on nommait, pudiquement et hypocritement, les " événements " – pour éviter de prononcer l'expression " guerre civile " – n'ont jamais réellement cicatrisé. C'est au cœur de ces blessures que Frédéric Casotti a puisé l'encre de son roman Dans les plis du drapeau. Il y retrace le parcours de plusieurs personnages emportés par l'ouragan de l'Histoire : un médecin pro FLN, un militaire qui rejoint l'OAS, un jeune voyou perdu dans la délinquance, un flic épuisé par le quotidien de son métier... Pour chacun d'entre eux, l'auteur accomplit ce tour de force : il leur insuffle la vie en mettant en avant leurs contradictions, leurs failles, l'impasse de leurs engagements... Peu de livres ont ainsi plongé au cœur des passions algériennes et notamment de l'OAS.

Porté par ses personnages, le roman avance alors au rythme d'une construction savante et captivante, brassant les destins et les époques. L'auteur y conjugue l'efficacité du polar à l'érudition de l'historien et mène l'ensemble avec la sensibilité d'un grand écrivain. Aucun cliché, aucune caricature... Ici l'ambiguïté appelle la justesse d'analyse, la soif de comprendre conduit naturellement au réalisme. On pense à la plume d'un Antoine Blondin qui aurait choisi soudain le roman policier. Ou d'un Jean-Patrice Manchette qui aurait délaissé la politique. Mais, surtout, on abandonne vite les comparaisons pour se laisser gagner par cette lecture instructive et captivante.