« L’herbe est douce. Fraîche. C’est humide. Mon ventre est chaud. C’est le soleil. J’ai les yeux fermés. Maintenant, le soleil envoie une lumière orange sous mes paupières. Il y a quelques secondes, les couleurs changeaient, pleines de petits points qui s’agitaient. C’est l’éblouissement, ça. C’est quand t’as trop fixé le soleil, quand tu fermes les yeux, pendant un moment, ça bouge sous tes paupières, ça change de couleur et de forme. Mais maintenant, c’est fixe. Ça bouge plus. C’est orange. Orange vif. » La montagne. Un village. Au loin, cette guerre. Dans un pré, une enfant précoce, Jeanne, dont la vie intérieure déborde de questions et d’imagination. Une vie intérieure qui la protège des brimades des autres enfants et de l’indifférence violente de sa mère. L’arrivée impromptue de Madeleine au village vient tout bouleverser, l’ennui qui s’étire, la solitude qui broie. La lumière s’immisce. La vie se dilate. Une amitié indéfectible naît. Jeanne tisse le récit de ses souvenirs qui surgissent au détour d’un parfum, d’un mot, d’une émotion. Tous les souvenirs. Ceux qui déchirent. Et les autres.