Grâce à la magie du grand et du petit écran, le souvenir de Robert Le Vigan se perpétue quinze ans après sa mort. Les nouvelles générations découvrent la personnalité tourmentée du plus grand acteur français de composition de ce siècle. C’est aussi une revanche, sans profit, gagnée par un acteur maudit, contre lequel un destin malchanceux s’acharna tout au long de son existence. Ayant connu le bagne, l’exil, la souffrance et la misère, victime du mépris, de la calomnie et de la haine, Robert Le Vigan fait, incontestablement, figure de mal-aimé du cinéma. On ignore la vie de ce comédien d’exception, tant apprécié de Duvivier, Renoir, Gance, Carné, Christian-Jaque et Becker, qui lui permirent de faire des créations inoubliables dans « La Bandera », « Les bas-fonds », « Quai des brumes », « Les disparus de Saint-Agil », « Goupi mains rouges », etc. Elle est restituée fidèlement dans ce livre par Hervé Le Boterf, qui fut à la fois l’ami et l’agent d’affaires paradoxal de Robert Le Vigan, à l’époque où celui-ci ne voulait plus tourner. Cet ouvrage est le fruit d’une correspondance — échangée pendant sept ans — entre le comédien retiré en Argentine et l’auteur. C’est donc Le Vigan qui s’exprime le plus souvent dans ces pages. Le livre s’enrichit de nombreux extraits de lettres, dans lesquels le comédien parle de Dieu, de la maladie, de la mort, de l’exil, de l’amitié, du spectacle. C’est un livre d’une facture insolite, hallucinant comme celui à qui il est consacré. Il passionnera non seulement les cinéphiles, mais aussi ceux qui s’intéressent à la petite histoire artistique et politique des années 30 et 40 et, plus encore, les nombreux « céliniens », puisqu’un chapitre est réservé aux déclarations de Robert Le Vigan sur l’auteur du « Voyage au bout de la nuit » et des « Beaux draps ».