Changer de politique, changer la politique ? Et si toutes les tentatives de cette nature, sans y prendre garde ou sans vouloir y renoncer, demeuraient prisonnières de procédures qui les conduisent à escamoter en même temps les réalités et leur manque de fondement ? Car, en dépit de sa tentation à vouloir parfois devenir simplement gestionnaire, la démarche politique est toujours plus ou moins liée à une théorie qui est supposée la fonder et la guider. Or rien ne semble plus suspect que les théories politiques qui ne reprennent à leur compte les diverses opérations de l’univers théorique que pour les dénaturer et les infléchir à leurs fins. Pour qu’une théorie politique mérite son nom elle devrait affronter les situations dans toutes leurs contradictions et donc orienter vers des choix qui avouent leur inconfortable complexité au lieu de chercher à la dissimuler sous des assertions simplifiantes. C’est là que résiderait le vrai changement dont auraient besoin la pensée et l’action politiques pour retrouver leur portée et leur crédibilité.