La Côte d’Azur en été, des villas luxueuses, des gens qui ont l’habitude de se rencontrer, d’échanger des invitations autant par goût du plaisir facile que par lassitude, amertume, ambition. Nous assistons, dans le nouveau roman d’Agnès Nanquette qui, déjà, avec « De A à Z », avait su évoquer l’inquiétante langueur des journées méridionales, à quatre repas où sont réunis quelques amis : autour d’Anne la romancière, qui aime Michel de Prat mais approfondit son expérience avec Florent Galtier, se groupent la sensuelle Nicole, gérante prospère de « La Tartane », et Henri, son époux rêveur ; Luc qui désire Nicole mais cédera par faiblesse aux avances de Louise Corsay, la riche et vieille antiquaire ; Pat, le pédéraste, qui est ébloui par les bijoux de Louise ; Roberte qui envoie des lettres d’amour à son mari lointain ; Camille la solitaire. Conversations lentes, éparpillées, changement de lumière, amertume, regrets, soleil, gourmandise, tristesses cachées, souvenirs de voyages, souvenirs de guerre, complicités multiples se tissant et se défaisant au cours d’heures paresseuses, telle est la matière extraordinairement sensible et fuyante qu’Agnès Nanquette a su maîtriser. La mesure du drame inexprimé chez ces « borgnes », mis face à face sans nécessité profonde, est comme révélée par la touchante figure de Stéphane, le petit garçon d’Anne, errant dans ce désert humain comme un elfe au cœur limpide.