Résumé
Le Groupe de recherche sur l'écriture nord-côtière du Cégep de Sept-Îles, le GRÉNOC, poursuit ses travaux. En 2006, il publiait le premier numéro de sa revue Littoral. Ce faisant, il «proclamait» alors l'existence d'une écriture nord-côtière avec ses particularités; il signifiait qu'un corpus de textes nord-côtiers existait. Et qu'il entendait le montrer. Et depuis 13 ans, à chaque parution de Littoral, le GRÉNOC confirme ce qu'il «proclamait» alors. Il le fait dans un premier temps, à propos de ses lectures, par le commentaire, l'étude, l'analyse, la synthèse, la recherche, les morceaux choisis... Et dans un deuxième temps, en faisant une place à la création, en permettant à des écrits inédits, anciens ou nouveaux, de paraître, attestant du même coup, surtout avec les textes récents, de la vitalité de l'écriture nord-côtière d'aujourd'hui. Mais à travers ce long processus de lecture et de publication, le GRÉNOC va désormais au-delà de la «proclamation», car celle-ci, en se répétant et en se confirmant, atteste d'un lent mais tenace processus d'élaboration, de construction, d'affirmation. L'écriture nord-côtière, aujourd'hui, existe... davantage qu'hier. Il fallait d'abord faire un geste, il fallait donc «proclamer» d'abord. Mais il fallait ensuite, pour affirmer davantage et pour faire exister encore plus, prouver, construire, élaborer. Bref, il fallait «fabriquer». Eh oui, on peut «fabriquer» une littérature! Et c'est ce que le GRÉNOC tente de faire depuis 13 ans sur la Côte-Nord.Le GRÉNOC publie cet automne le 13e numéro de sa revue Littoral. Comme dans les numéros précédents, on y trouvera des articles divers qui, sans s'intéresser à une thématique particulière, poursuivent l'étude de l'écriture nord-côtière à travers des textes représentant deux des trois cultures fondatrices de la Côte-Nord: innue et francophone. La démarche vise en même temps à étudier plus largement la représentation de la Côte dans les textes étudiés, son imaginaire donc, et, ce faisant, à cerner la singularité et la spécificité de notre vaste région à travers ses multiples réalités et ses problématiques particulières. On remarquera, au fil des textes, que s'enrichissent en se croisant souvent, les approches analytiques, réflexives et créatives. Comme toujours, dans certains articles, le souci de la dimension historique est évident; alors que dans d'autres, c'est plutôt la dimension géographique qui retient l'attention - celle-ci est notamment prise en charge dans ce numéro, pour la première fois, par un premier exercice de cartographie de l'espace nord-côtier; une autre manière de représenter la Côte-Nord, une autre manière de l'écrire... et d'en faire aux autres une proposition de lecture différente. Le Nord, enfin, reste à l'ordre du jour, qui devient ici une occasion de réflexion sur l'espace nord-côtier: à la fois sur sa géographie singulière et sur la manière dont on l'a toujours, à travers le temps, perçu, exploité et géré; une réflexion qui permet aussi d'arriver à notre époque et à ses dérives.Le volet autochtone, encore une fois, occupe une large place. Une étude nous renseigne sur la présence mal connue des Iroquoiens en Haute-Côte-Nord et au Saguenay. Mais il est surtout question ici des Innus. À travers, notamment, l'étude de certaines des oeuvres de Natasha Kanapé Fontaine, Manon Nolin, An Antane Kapesh. Les Innus sont aussi présents dans les inédits avec un texte qui nous vient de Pessamit. Enfin, on pourra lire, en pers- pective historique, une proposition de réflexion sur le long processus de construc- tion - à travers une démarche de traduction - de l'écriture montagnaise, aujourd'hui une authentique et dynamique littérature innue. Plus largement, la question autochtone est également abordée par de nombreux textes écrits par des Allochtones : tant par des religieux que par des artistes ou des spécialistes. Le rayonnement de la littéra- ture des Premières Nations est enfin pris en charge, que ce soit à l'occasion de la parution d'une anthologie destinée aux jeunes ou par le fonds autochtone de la Bibliothèque Gaston-Miron de Paris.Le volet de l'écriture française est quant à lui représenté par deux types de locuteurs: ceux qui écrivent «en» région et ceux qui écrivent «sur» la région. Dans ce numéro, on poursuit en approfondissant l'étude de deux poètes: le premier est bien connu, natif de la Côte, Roland Jomphe, un authentique Minganien, un vrai «Cayen». Dans ses textes nombreux, le poète et le conteur se livrent généreusement. Le second est venu de Québec, mais a vécu en Minganie. Cet espace si particulier de la Côte-Nord - de mer, d'îles, de littoral et de plaines - comblera les aspirations de Charles Lebel Therrien... mais dans un premier temps seulement. D'autres auteurs enfin, qui se sont intéressés à la Côte ou au Nord, à leur manière, sont étudiés dans ce numéro. Les écrits des jésuites Le Jeune et La Brosse évoquent la lointaine époque des missions des XVIIe et XVIIIe siècles. Tandis que d'autres textes sont plus proches de nous: ainsi ceux des Pierre Perrault, Jean Désy, Jean-Yves Soucy, Philippe Ducros, Véronique Bachand, Mathieu Renaud et Noémie Pomerleau-Cloutier. Chez cette dernière, qu'on retrouve en couverture, la géographie, la faune et la flore nord-côtières deviennent un réservoir d'images éton- nantes et touchantes qui témoignent, dès un premier recueil, d'une plume mature, évocatrice et sensible, ce dont nos lecteurs pourront se rendre compte en lisant, dans notre section «Inédits», une suite poétique de son cru, «Fille».D'autres inédits racontent aussi la Côte de diverses manières, et dans des tonalités différentes. Enfin, comme d'habitude, la dernière rubrique rendra compte des activités du GRÉNOC durant la dernière année. Par ailleurs, il faut souligner, de façon particulière, une contribution majeure à ce numéro, celle du professeur Daniel Chartier de l'UQAM qui, avec certains de ses étudiants, a réalisé deux index qui rendent compte des publications des douze premiers numéros de la revue Littoral. Le comité directeur du GRÉNOC tient à remercier le professeur Chartier et son équipe. Leurs travaux permettront aux curieux et aux chercheurs de rapidement voyager dans Littoral en fonction de leurs besoins.Encore une fois, dans ce numéro, le lecteur rencontrera des collaborateurs «de la Côte» et «de l'extérieur de la Côte», des universitaires et des non-universitaires, des auteurs connus et d'autres qui publient pour la première fois. Cette fois-ci, du Québec évidemment, de la Côte ou de la ville, mais aussi de France, d'Italie et des États-Unis. C'est grâce à eux et à leur générosité que Littoral se construit, s'enrichit, affirme sa personnalité et sa singularité. Et rayonne un peu plus. Merci à eux.Soulignons enfin que ce 13e numéro est publié en collaboration avec la maison d'édition de Québec, Septentrion. Le GRÉNOC est persuadé que cette collaboration permettra à Littoral de rayonner davantage.Dans deux ans, en 2020, le GRÉNOC publiera son numéro 15. Si tout va comme prévu, on s'y intéressera de façon plus particulière au fleuve, au golfe, à l'estuaire, à la mer. Et aux îles. On en reparlera. Mais il faut déjà y penser.