Ce livre vrai est l’histoire poétique et tendre d’une famille française comme il n’y en aura plus. S’effacent sur le sable les traces de ses pas. Il s’ouvre par un journal de la mère de l’auteur à l’usage de ses petits-enfants, relation très simple fixée par un langage sans préciosité et qui n’a à refléter que le charme désuet des évidences naturelles. Pas de monstres, pas de délire sexuel, pas de drogues. Tout prépare le bonheur. C’est dans cette réserve miraculeuse qu’en pleine guerre — l’autre — naît Michel Junot. Après les « Années folles », les grandes orgues hitlériennes, les flaques de sang du 6 février, les drapeaux rouges de 1936 ouvrent les yeux de notre héros de Giraudoux. Il va, traversant la guerre et l’Occupation, prendre avec flegme des risques qui ont conduit d’autres que lui vers la déportation ou vers la mort. Mais lui, au cœur du drame, jamais n’oublie les leçons des heureuses années d’apprentissage. Si le bonheur n’était qu’une illusion, il ne serait pas inutile de la cultiver.