Cette histoire passionnante, en fait, n’est pas celle de Ninfa Tabuto alias Santa Puttana, mais l’histoire de David Cherubini, Américain d’origine sicilienne, qui évoque d’abord son enfance studieuse à Mulberry Bend, le quartier italien de New-York. En toile de fond : l’inévitable maffia, mais présentée sous un jour plutôt réjouissant ! Évitant l’apologie d’un gangstérisme qui le dépasse, David Cherubini découvre, par le petit bout de la lorgnette, la maffia des sans-gloire, des sous-fifres, exécuteurs des basses œuvres, flingueurs patentés, comme d’autres sont employés aux écritures. Celles des Baba-luce, Plum-pudding, Sassaiola, Grilletto et autres redoutables traîne-savates, audacieux à l’occasion, mais jamais téméraires, surtout quand il s’agit de conjurer les effets du mauvais œil. Dans ces cas-là, les Siciliens n’estiment-ils pas plus efficace de palper sournoisement leur braguette, plutôt que toucher du bois comme le commun des mortels ? Il reste aux dames la ressource de se signer à tour de bras, exorcisme de remplacement pour neutraliser la jettatura. Les dames, comme la venimeuse Schriacciata, par exemple, qui cherche à consoler Cherubini : “Malheur ! Si on ne fait pas ses 20 ans de prison tant qu’on est jeune, ma belle, quand c’est qu’on les fera ?” Ou l’inconstante Carmella Cacace, plus connue sous le pseudonyme de Lilly, Love, dans un tout autre genre ! Premiers émois. Premières déceptions aussi, mais le destin facétieux prendra des chemins détournés pour que David rencontre l’amour avec un A - A - A majuscule, à Rome, un soir d’entre les soirs, dans l’obscurité complice des jardins de la Villa Borghese... Il y a un illustre précédent, certes, Marie-Madeleine, dûment sanctifiée, elle, mais la deuxième tenante du titre de Santa Puttana ne figure pas encore dans le calendrier des postes. Il y a peu de chances, d’ailleurs, pour que le Saint-Siège se penche sur le cas édifiant de Ninfa Tabuto, et les procédures de canonisation s’éternisent, parfois pendant des siècles. Dans ces conditions, autant bousculer le mouvement, non ?