Résumé
Les quatre nuits d'Alfred de Musset ont été écrites en l'espace de deux ans et publiées dans la "Revue des deux Mondes" dans l'ordre suivant : Nuit de Mai, 15 juin 1835. Nuit de Décembre, 1er décembre 1835. Nuit d'Août, 15 Août 1836. Nuit d'Octobre, 15 Octobre 1837. Cependant, l'ordre chronologique des compositions successives ne correspond en aucune façon à l'esprit même des Nuits. Voici d'ailleurs ce qu'en dit Paul de Musset, biographe de son frère. "Nuit de Mai. Alfred de Musset n'écrivit rien pendant les premiers mois de l'année 1835, mais un soir de Mai, Alfred Tattet ayant demandé à Alfred de Musset que lserait le fruit de son silence. "Je crois sentir enfin, répondit Musset, que ma pensée comme une plante qui a été longtemps arrosée, a puisé dans la terre des sucs pour croître au soleil. Il me semble que je vais bientôt parler et que j'ai quelque chose dans l'âme qui demande à sortir". Ce qui demandait à sortir, c'était la Nuit de Mai. Un soir de printemps, en revenant d'une promenade à pied, Alfred me récita les deux premiers couplets du dialogue entre la Muse et le Poète qu'il venait de composer sous les marronniers des Tuileries. Il travailla sans interruption jusqu'au matin. Lorsqu'il parut à déjeuner, je ne remarquai sur son visage aucun signe de fatigue. Il avait comme Fantasio, le mois de Mai sur les joues. Le soir, il retourna au travail comme à un rendez-vous d'amour. Il se fit servir un petit souper dans sa chambre. Volontiers, il aurait demandé deux couverts, afin que la Muse y eut sa place marquée. Tous les flambeaux furent mis à contribution ; il alluma douze bougies. Au matin de ce second jour le morceau étant achevé, la Muse s'envola. Le Poète souffla ses bougies et dormit jusqu'au soir. Après avoir écrit la Nuit de Mai, comme s'il eut senti la guérison dans le premier baiser de sa muse, il me déclara que sa blessure étaiti complètement fermée. Je lui demandai si c'était tout de bon, et si cette blessure ne se rouvrirait jamais. "Peut-être, me répondit-il mais si elle s'ouvre encore, ce ne sera jamais que poétiquement". La douleur de cette blessure se raviva cependant plusieurs fois et, jusqu'à l'agonie, Alfred de Musset fut hanté par le souvenir de George Sand, qui est l'inspiratrice de cette Nuit de Mai. Nuit de Décembre. En 1835, malgré ses nombreux travaux, mon frère trouva le temps de visiter assidûment une joulie femme, d'en devenir amoureux et de se faire aimer d'elle en lui adressant les stances "A Ninon". Mais cette aventure s'était dénouée avec une précipitation foudroyante ; Alfred resta comme étourdi de son malheur ; mais son abattement ne dura qu'un instant. Le premier cri arraché par cette nouvelle blessure est la Nuit de Décembre, qui ne fait point suite comme on le voit, à la Nuit de Mai, mais prend sa source dans des sentiments d'un ordre bien différent. Je sais que beaucoup de lecteurs ont cru voir, dans la Nuit de Décembre, un retour sur les souvenirs d'Italie et une sorte de complément à la Nuit de Mai. Il importait de ne point laisser place à un doute sur le passage de cette poésie où l'amant abandonné adresse des reproches à une femme "qui ne sait pas pardonner". Connaissant la vérité, je ne pouvais point permettre de confusion entre deux personnes très différentes, dont une seule avait quelque chose à pardonner et le droit de refuser son pardon. Nuit d'Août. La Nuit d'Août fut vraiment pour l'auteur une nuit de délices. Il avait orné sa chambre et ouvert les fenêtres. La lumière des bougies se jouait parmi les fleurs qui emplissaient quatre grands vases disposés symétriquement. La muse arriva comme une jeune mariée.
Auteur
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Avant Baudelaire, Musset (1810-1857) peut bien faire figure de poète maudit: rarement un écrivain a mis une telle constance à refuser de faire carrière et à se détruire. L'avenir qui s'offre au jeune homme de dix-huit ans, reçu parmi les écrivains qui peuplent le salon de l'Arsenal de Nodier, est pourtant prometteur. Mais Alfred de Musset - ce sera une de ses constantes - préfère la vie à l'écriture et use ses nuits avec divers joyeux compagnons de débauche. À dix-neuf ans, ses Contes d'Espagne et d'Italie l'ont déjà fait remarquer, mais l'échec, en 1830, de La Nuit vénitienne à l'Odéon l'éloigne pour longtemps des salles de théâtre. Son oeuvre dramatique sera constituée de pièces à lire "dans un fauteuil": À quoi rêvent les jeunes filles (1832), Les Caprices de Marianne (1833), On ne badine pas avec l'amour (1834) et Lorenzaccio sont publiés dans la Revue des Deux Mondes bien avant d'être représentés sur scène. Les années 1830-1839 témoignent d'une grande activité créatrice. Musset écrivait tantôt très vite, tantôt avec peine, s'aidant de l'alcool au cours de longues nuits solitaires où il interdisait à quiconque de pénétrer dans sa chambre. Jouant de tous les registres, Musset ne tarde pas à ironiser avec verve sur ses amis romantiques. Plus angoissée, La Nuit de décembre évoque la présence obsédante de l'autre: "le malheureux vêtu de noir,/Qui me ressemblait comme un frère". La tumultueuse liaison avec George Sand n'apporte pas à Musset d'apaisement. Il revendique hautement sa débauche dans La Confession d'un enfant du siècle: "la vue d'une femme me faisait trembler. Que de fois je me suis relevé, la nuit, baigné de sueur, pour coller ma bouche sur les murailles, me sentant prêt à suffoquer!" L'amour, à la fois plaisir et passion, est une excellente raison de vivre et de mourir: Rosette (On ne badine pas avec l'amour, 1834) et Coelio (Les Caprices de Marianne, 1833) meurent pour avoir trop cru à l'amour; Lorenzaccio, lui, cherche sa voie, déchiré entre la débauche et la pureté. Après 1840, comme fatigué et dédaigneux du monde, Musset ne publie plus. À partir de cet instant, des sonnets, des chansons, des stances commencent à traîner pêle-mêle sur sa table. "Il s'amusait à les écrire à la hâte, quelque fois en abrégé, sur des chiffons de papier, sur une enveloppe de lettre, (...) comme pour établir que tout cela n'intéressait que lui et ne devait pas voir le jour." Musset rejoignait peu à peu le "frère vêtu de noir": "Viens à moi sans inquiétude. (...) / Ami, je suis la Solitude." Les années 1847-1848 voient un regain d'intérêt pour l'oeuvre de Musset, qui fait jouer deux nouvelles pièces: Il faut qu'une porte soit ouverte ou fermée et Il ne faut jurer de rien. L'élection à l'Académie française récompense en 1852 Le Poète déchu (titre d'une confession inachevée de 1839) et rappelle à la mémoire de chacun l'auteur de La Nuit de mai: "Les plus désespérés sont les chants les plus beaux, Et j'en sais d'immortels qui sont de purs sanglots".
Auteur(s) : Alfred de Musset
Caractéristiques
Editeur : Saga Egmont French
Auteur(s) : Alfred de Musset
Publication : 1 avril 2022
Support(s) : Livre audio [MP3]
Protection(s) : Aucune (MP3)
Taille(s) : 34,1 Mo (MP3)
EAN13 Livre audio [MP3] : 9782821111103