Mon ami Bob Roberts n’est pas un gars facile, c’est ce que vous diront ceux qui se sont bagarrés avec lui. Mais ses amis vous diront, eux, que ce coriace est un tendre. Une romance de faubourg le fait chialer, une belle fille qui passe le fait sourire, une bonne bouteille le fait s’arrêter. C’est la vie. Et c’est SA vie. Elle n’est peut-être pas très belle, comme on dit, mais elle est déjà longue et ses aventures ne sont pas finies. Il y a des gens qui récoltent, dans leur assiette, la seule arête du poisson, le seul cheveu de la soupe, et qui sortent du métro avec la seule puce du compartiment. Bob Roberts, lui, c’est l’aventure qui le cherche. Et serait-elle chassée de partout, dans un monde de conformisme sans joie, l’aventure, que c’est chez lui qu’elle irait frapper. "Vous parlez d’une connerie", qu’il dit. Mais, au fond, il est ravi. Je l’ai rencontré pour la première fois dans un bar. Évidemment. Il se cachait derrière un cigare de millionnaire et son œil bleu riait vers une fille qui ne cachait pas grand chose de sa poitrine. Cinq minutes après, ils partaient ensemble. La fille, c’était ma maîtresse et j’aurais pu me fâcher. À quoi bon ? J’ai préféré devenir son ami, à Bob. Une femme, ça se retrouve toujours ; des belles histoires comme celles que Roberts me raconte, ça ne court pas les rues. Je pense que ce sera votre avis, vous qui lirez celle-ci, ou qui venez de la lire.