On l’appelait « le parrain » du Syndicat du Livre, mais c’est très exagéré… Il a régné, depuis 1975, sur les sept mille ouvriers des imprimeries de la Presse parisienne et on raconte qu’il a décidé de la mort ou de la vie de tel ou tel journal, mais c’est très exagéré… Quoique ? L’histoire de Roger Lancry, petit Juif d’Oran monté à Paris en 1936, devenu le puissant secrétaire du Comité interpresse du Livre parisien, accompagne et nourrit l’histoire de la Presse française depuis la Libération. Il a affronté tous les patrons de presse, tel Émilien Amaury auquel il a mené en 1975 une véritable guerre, détruisant ses journaux, bloquant ses imprimeries, faisant le coup de poing avec ses nervis. Il a négocié durement avec Robert Hersant. Il a affronté Jean-François Kahn ou Philippe Tesson, Claude Perdriel ou Serge July. Il n’a jamais été au Parti communiste, ce qui, pour un responsable de la CGT, est une sorte d’exploit ; il n’a pas hésité à s’opposer à Henri Krasucki ou à dire ce qu’il pensait des dérives sectaires de sa Confédération. Il s’est imposé dans de multiples conflits comme un entraîneur d’hommes uniquement soucieux des intérêts de ceux qui l’avaient élu. Aujourd’hui, il raconte ses combats, témoigne de ses succès comme de ses erreurs. Un syndicaliste, mais aussi un homme libre que sa personnalité a porté à de hautes responsabilités mais qui jamais n’a voulu se tromper de combat.