Comme beaucoup d’autres épistoliers inspirés, j’ai éprouvé un besoin impérieux de décrire, presqu’au jour le jour, le sort de la France, rythmé par le tempo sanitaire et gouvernemental qui a discipliné notre existence pendant deux mois. Le déconfinement du 11 mai 2020 a sifflé la fin de la première mi-temps mais la partie n’est pas terminée car le virus que j’appelle « l’Invincible-invisible » sévit toujours. Ce qui est terminé, c’est la saison de l’enfermement chez soi, en soi. Tout « le dit » des instances officielles et le non-dit de ses conséquences sur le cours confiné de nos vies, voilà qui méritait un traçage mémorable. En effet, la longue claustration imposée et admise par nous, était un impensé de la réalité. J’ai voulu capter ce réel inattendu dans sa frugale simplicité ; l’incertain, devenu la seule certitude dans une étrange fixité temporelle. Au moment même où personne ne devait bouger au risque de galvaniser le virus C-19, le climat social n’a cessé de bouillonner, de nous empoigner, de nous déboussoler. J’ai voulu montrer combien l’envie de se recréer, née de l’oisiveté, pouvait insuffler le dessein de s’élever. J’ai voulu exposer la fécondité des intentions qui naissent du tourment ainsi que la solidarité qui naît de la solitude. J’ai voulu observer les germes de désir d’une mutation démocratique qui naissent de l’essoufflement des gouvernances abattues. Qu’en sera-t-il demain quand le métronome des maîtres de la finance reprendra sa partition et quand les nuages de cendre, à nouveau, fleuriront les cieux bleus ?