Arlette Movet prend place dans la chaîne des poètes, qui se demandent ce qui est rêve et ce qui est réalité, si nos souvenirs sont bien réels, ou si nous les transposons inconsciemment par la grâce d’une sorte de transsubstantiation. Elle transpose ses souvenirs en rêves, et ses rêves en poèmes. Elle donne des couleurs à l’abstrait : pour elle, la solitude et le silence sont oranges, l’agonie est multicolore. Mais aussi, elle projette ses rêves dans la réalité. Les personnages fictifs lui sont aussi réels que ceux de chair, et elle s’adresse à Maldoror - ou évoque Dargelos - comme des frères dans l’intimité quotidienne desquels elle aurait vécu sa vie, ou une autre vie. Tout comme la littérature, la musique imprègne fortement son inspiration ; les sons lui sont aussi palpables que les odeurs, et l’ineffable a pour elle un goût précis. Elle donne l’impression de vivre dans une rupture du temps, sur la tranche d’un miroir, dont l’envers et l’endroit reflètent - à volonté - des images identiques et cependant dissemblables, dans un monde où le créé et l’incréé se confondent, dans un éclairage savamment réglé par le poète.