L’an 1943, un lycéen rêveur abandonne sa famille, ses livres, l’atmosphère de l’Occupation, pour « tenter de vivre » hors des routines, des sentiers battus et des contraintes. La « dissidence » sert de prétexte à cette fugue qui, d’hôtels borgnes en prisons pouilleuses, de convois militaires en bateaux fantômes, et dans un refus qui va s’exaspérant, devient un vagabondage forcené en marge de la guerre et de tout conformisme. Laurent « à tout asservi » et totalement insoumis, livre les tracs, les tracas, les errements et les révoltes d’un adolescent qui se veut lucide dans un monde aveuglé par l’horreur. Des prisons d’Estramadure au désert tripolitain, de Casablanca à Naples, d’Athènes aux îles Dalmates, c’est un fourmillement de pauvres êtres torturés, à la limite d’eux-mêmes et de l’espoir. C’est un grouillement de bellâtres, d’idéologues et de combinards dont le moindre geste est authentique, la moindre parole vraie. Parmi ces décombres traversés d’abord d’un pas léger, c’est le visage de l’Occident qui est évoqué : un Occident meurtri, douloureux, mais appelé à revivre dans la jeunesse d’une fraternité durement conquise.