Le prestige du passé, de quelle nature est-il, et sur quoi repose-t-il ? Quelles ont été ses métamorphoses ? Il s’est manifesté de façons diverses dans la diversité des temps et des lieux : dans l’Egypte des premières et dans celle des dernières dynasties, dans la Chine des Han et dans celle des Song, dans le Japon des Tokugawa et dans celui que nous connaissons aujourd’hui, dans les mondes grecs d’Athènes, d’Alexandrie et de Byzance. Qu’a-t-il été pour les humanistes du XVIe siècle, les classiques du XVIIe, les préraphaélites du XIXe ? Qu’ont été ses rencontres avec la doctrine du progrès, avec le dynamisme de la science ? Qu’en advint-il dans la querelle des Anciens et des Modernes, dans celle des classiques et des romantiques, et qu’en est-il demeuré, enfin, dans la sensibilité moderne ? S’est-il dissipé, s’est-il renforcé, en présence de la transformation générale du monde, à laquelle nous assistons ? Le contraste, assurément, est étrange, entre la fièvre du devenir qui s’est emparée de nous et de la séduction qu’exercent sur nos sensibilités les formes les plus archaïques de l’art et de la pensée.