Alice s’émerveille à chaque instant du fait d’être en vie. Sentir, voir, écouter sont les seuls mouvements dignes de son attention et sont des événements en soi. Naître est un don trop précieux pour qu’il soit divisé, parcellisé : Alice refuse de fragmenter la vie. Elle veut toute la vie, tout sentir : c’est pourquoi elle ne marque nulle préférence. Aimant tout, elle n’aime rien. Elle s’implique entièrement dans le moindre de ses actes, mais ne se donne pas à une chose ou une personne en particulier. C’est pourquoi, fondamentalement, nul ne peut la posséder : elle est vierge. Benjamin est séduit par cette faculté de se déployer, sans obstacle et sans frein. Il la désire. Or, cette faculté est la virginité, et l’atteindre signifie fatalement la tuer. Comment agir quand l’obstacle qui empêche l’action est la réalisation même de cette action ? Comment pénétrer Alice en sauvegardant sa virginité ?