Deux vieilles dames vivent sous les toits et ne pensent plus guère qu'à leurs souvenirs, vrais ou faux. Une petite fille habitant dans la même maison vient les voir. Elle aime écouter leurs histoires, les récits du temps où on devait se tenir droite et faire de bonnes actions. Mémoire des familles. Saveur du passé. Regrets. Amertume de l'âge. Dans leur chronique des années disparues, les deux sœurs brodent et extravaguent. Elles prétendent avoir vécu autrefois dans une jungle fabuleuse. Elles avaient habité des pays sauvages. Elles partaient dans la forêt. Avec leurs dix frères et sœurs à la queue leu leu sous les taillis, creusant des boyaux au travers des ronces. C'était en Amazonie... Il y a de l'humour chez ces dames, une fantaisie folle de Chaillot, Mme de Ségur emmêlée parfois avec Lewis Caroll. Pourquoi la mélancolie du présent, le regret de l'Éden perdu et les plaisirs de la fantaisie ne favoriseraient-ils pas l'invasion du vieil appartement par des bêtes sauvages — une invasion amazonienne ? La petite fille est complice. Parce qu'il y aura toujours, dans les enfances, des histoires et des vieilles dames pour les raconter. Ainsi, les vieilles dames restent-elles des petites filles aventureuses, et les petites filles, émerveillées et compatissantes, apprennent, au fil des contes, à apprivoiser le sort.