Suivez les reboiseurs dans leurs rêves et leur dur labeur, au coeur des grands espaces de l'Ouest canadien !
J’ai appris de la femme que j’aime que ce n’est pas le silence qui neutralise les individus, mais l’absence de repères, ceux qui balisent les échanges, le soutien moral et la reconnaissance. Quotidiennement, nous avons su éclairer et guider nos actions de façon commune et le reboisement, la plantation d’arbres dans l’Ouest canadien, nous a servi de balise indiquant le tracé d’une vie rêvée. Le rêve est le fidèle compagnon de sa vie. Plus on s’en rapproche, plus il prend du relief et des couleurs. Les chemins de l’existence se manifestent aussi sur les versants ensoleillés d’une terre mise à nue, couverte d’épilobes.
Découvrez, dans ce roman, comment les rêves de liberté du narrateur se retrouvent mêlés à un quotidien gouverné par la productivité.
EXTRAIT
Occasionnellement, dans les terrains les plus dégagés, je chante en travaillant. Pour un moment, chanter ou siffloter un air agréable permet d’évacuer les nombreux soucis empilés par l’esprit. Dans le reboisement, lorsqu’on a développé adéquatement les gestes et les déplacements routiniers de la plantation, on peut se permettre de penser à autre chose tout en poursuivant l’abrutissant labeur de planter des arbres. Même si parfois les gardes forestiers du ministère de la Faune nous accompagnent avec de longs fusils pour assurer notre protection en forêt, se manifester haut et fort permet d’apaiser les craintes qui relèvent de la fabulation. J’anticipe toujours la présence de cette bête menaçante, le roi de la forêt continentale qui rôde continuellement dans le buisson de mon imaginaire ; l’ours Grizzli. Mais enfin ! Je plante des arbres aux rythmes de musiques du monde que je pige sur la carte mémoire de mes souvenirs. Je travaille en économisant les gestes, sans m’arrêter, parce que je n’ai rien d’autre de concret à faire que de planter les boutures d’arbres qui défilent de mes sacs, à ma main, à la tranchée au sol fait à l’aide de ma pelle que je referme sec, d’un coup de pied. Je chante presque toujours les mêmes rengaines en jonglant avec des vers à moitié oubliés dans un milieu hostile où la cadence de production représente ma rémunération. Jouer avec la musicalité de l’esprit accroît grandement la capacité de résilience.
À PROPOS DE L'AUTEUR
Benoit Asselin est un passionné de voyages et de découvertes. Depuis son plus jeune âge, il a dévoré les livres pour se nourrir de lectures afin de mieux comprendre la trajectoire des hommes. Il écrit depuis 1998 et, depuis, il écrit tous les jours. Bien naturellement, l’écriture a pris toutes sortes de directions et elle lui permet, aujourd’hui, de défendre sa propre humanité.