Deux femmes, deux voix. La plus âgée est veuve et chômeuse, et ses raisons d'être lui ont échappé à mesure que, l'un après l'autre, ses fils l'ont quittée. La plus jeune, Sylvie, s'avance entre la jubilation et l'effroi vers sa première maternité. Tout les sépare, et le fait qu'elles soient belle-mère et belle-fille n'est pas la moindre de leurs contradictions. Leurs discours, cependant, sont étrangement voisins : peut-on être mère sans y laisser sa peau ? Qu'est-ce qu'être mère sinon être délogée de son corps, expulsée de sa maison, exclue de son temps, de ses jours et de ses nuits ? Interrogation hurlée dans la panique ou ressassée dans le désespoir par deux paroles qui se cherchent, se heurtent et se repoussent. Pourtant, il est infiniment désirable d'être mère, parce qu'en nous marchant sur le corps, en piétinant nos ventres au travers desquels ils passent, en nous envahissant de tout leur être, nos enfants nous enseignent à nous seules ce que leurs pères, au corps irrémédiablement intact, ne connaîtront jamais.