Paul-Émile Victor raconte. Quand on l’a entendu raconter l’histoire de sa vie lors de conférences ou au milieu d’un groupe d’amis, on comprend ce que raconter veut dire. C’est Marco Polo égrenant ses souvenirs de voyage ; c’est aussi, parfois, du bon, du très bon Marcel Pagnol. Surprenant destin en effet que celui de ce jeune Jurassien que tout semblait destiner à prendre la succession de son père, petit fabricant de pipes et de stylos. Mais le jeune Paul-Émile ne se voit pas finir ses jours dans un bureau. Son univers à lui, c’est une mansarde de la maison familiale où il rêve entre les murs tapissés de cartes. D’un côté, celles de la Polynésie, avec ses îles perdues dont les noms chantent comme une mélopée obsédante : Oaku, Kauaï, Pukakupa, Maninibiki, Raratonga... Sur l’autre mur, les contrées du froid et des glaces aux noms tout aussi lourds de mystère : Kotzebue Sound, Hudson Bay, Thulé. Le jour où il faudra décider, c’est le hasard comme toujours qui lui fera choisir le Nord : ce sera sa rencontre avec le grand explorateur de l’époque, Jean Charcot, qui le remarque et l’encourage. A bord du « Pourquoi Pas ? », il fait son premier et merveilleux voyage vers le Groenland. Peu à peu, l’Europe familière s’éloigne et Paul Émile Victor vogue au rythme lent de la voile et du charbon, à la rencontre des icebergs, des ours blancs, des Eskimos. Août 34 : Terre ! Paul-Émile Victor débarque à Scoresby Sund ; l’aventure a commencé.